SENS et l'ANGLETERRE


Sénonais d'adoption depuis plusieurs décennies et passionné d'Angleterre, il nous est apparu intéressant de chercher les liens qui unissent ces deux univers dans le temps. Voici le fruit de nos recherches ...

Sous-préfecture de l'Yonne qui affiche clairement (voir logo) son attachement à la Bourgogne dont elle marque quasiment la limite nord en bordure de la région parisienne, SENS exprime ainsi sa volonté de n'être pas aspirée par Paris (à 110 kms au nord) alors que Dijon dont elle dépend est 2 fois plus éloignée. Au cours des siècles, cette ville, au prestige très variable, a vu ses liens avec l'Angleterre (un pays quand même pas tout proche) se nouer de manières diverses... Logo de la ville de Sens (années 1990)

Au Moyen-Age :

Agréable ville de province, Sens est fière de sa cathédrale Saint-Etienne (la première grande cathédrale gothique de France - les débuts des travaux remontant aux années 1130/1140 et se poursuivant jusqu'en 1176) et de son Palais Synodal (aux tuiles vernissées on ne peut plus "bourguignonnes"), monuments qui attestent de sa grandeur religieuse passée marquée par l'installation dans ses murs du Pape ALEXANDRE III en 1163 et par le mariage de LOUIS IX, dit Saint Louis, avec MARGUERITE de PROVENCE en 1234.

Mais avant ces grandes noces fastueuses qui glorifièrent la ville, il faut noter (après le voyage de l'archevèque GUILLAUME en 936 pour ramener en France le roi LOUIS IV l'Outremer réfugié en Angleterre) un autre évènement qui restera certainement comme étant le premier contact connu des Sénonais avec la Grande-Bretagne : le séjour de l'Archevêque de Canterbury, Thomas BECKETT, qui cherchait un refuge pour fuir la colère de son roi, HENRY II d'Angleterre. BECKETT se replia donc tout naturellement à Sens pour se plaindre de son roi auprès du Pape qui résidait là à cette époque. En 1170, de retour à Canterbury, Beckett sera d'ailleurs assassiné dans sa cathédrale. De nombreux objets lui ayant appartenu sont encore visibles au Musée du Trésor de la Cathédrale de Sens. Et qui nous dira les pensées des Sénonais s'il  leur est arrivé d'entendre les rares gens de la suite de Thomas Beckett parler éventuellement une langue bizarre dans les rues de la ville ? (à moins qu'ils n'aient tout simplement parlé "normand").

Les liens avec l'Angleterre seront bientôt renforcés, en 1175, lorsque Maître GUILLAUME (WILLIAM of SENS pour les Anglais), qui avait participé au chantier de la cathédrale de Sens, fut invité à reconstruire, en utilisant le modèle sénonais, le choeur de la cathédrale de Canterbury endommagée par le feu. Il y édifiera également un tombeau pour Thomas Beckett. Durant les travaux, il chuta d'un échafaudage - blessé, il rentra en France où il succomba.

Vers l'an 1200, un vitrail fut posé dans le déambulatoire de la cathédrale de Sens qui illustre l'arrivée de Thomas Beckett sur son navire traversant la Manche.

A l'époque de la Guerre de 100 Ans :

En 1337, EDOUARD III, roi d'Angleterre, revendique le trône de son cousin français. C'est le début de la Guerre de 100 Ans. Sens souffre alors de la famine qui s'en suit. Les Anglais s'installent en Champagne, aux portes de Sens. La peur fait partie du quotidien dans le Sénonais.

La France au XIIème siècle
  • Terres du Roi d'Angleterre              
  • Terres du Roi de France                       
  • Terres des Vassaux du Roi de France         

En 1356, au cours de la bataille de Poitiers, l'archevêque de Sens, GUILLAUME de MELUN, est fait prisonnier avec le Roi JEAN le BON qu'il accompagne en captivité à Londres...

En 1358, le Dauphin CHARLES, régent du royaume de France, fait un séjour à Sens : il ordonne de creuser des fossés autour de la muraille gallo-romaine qui est alors remise en état pour protéger la ville.

En 1368, afin de lever des impôts pour continuer la lutte, CHARLES, devenu entre temps CHARLES V le SAGE, convoque les États Généraux à Sens, au Palais Synodal. La guerre ravage la région : la ville de Sens est régulièrement assiégée par les Anglais qui raseront même, en 1378, le village de Soucy à 5 ou 6 km de là.

Au début du XVème siècle, les luttes entre le Duc d'Orléans et le Duc de Bourgogne permettent aux Anglais de reprendre l'offensive. En 1415, l'Archevêque de Sens (JEAN de MONTAIGU) est tué à Azincourt. L'année suivante, le Duc de Bourgogne s'allie aux Anglais qui reviennent assiéger Sens. En 1420, à Troyes (qui se situe à 60 km), le nouvel Archevêque de Sens (HENRI de SAVOISY) marie HENRY V, roi d'Angleterre, et CATHERINE de France (fille du roi Charles VI le FOL). A la mort de ce dernier, la couronne de France est promise à Henry. Suite à la noce, les troupes anglaises et bourguignonnes décident de prendre par force la ville de Sens qui résiste. Le siège dure 12 jours puis la ville doit se rendre. Sens devient anglaise pour 10 ans !

La France en 1422 
  • Terres anglaises             
  • Royaume de France          
  • Duché de Bourgogne           
  • Duché de Bretagne                 

En 1429, Jeanne d'Arc se heurte à la ville toujours anglaise qu'elle devra contourner à gué, les autorités locales lui refusant le passage par les ponts. En 1430, les Sénonais expulseront les Anglais de leur ville et accueilleront Charles VII le VICTORIEUX qui refera la conquête de ses terres.

[cf. "Histoire de la ville de Sens" par Frédéric BITTON © 1943, et la Bande Dessinée "l'Épopée Sénone : Sens" publiée en 1991]


Au XIXème siècle :

... Beaucoup plus tard, Sens fut le témoin des années de lycéen du jeune poète Stéphane MALLARMÉ, entre 1856 et 1860. C'est dans les murs du lycée impérial de Sens où il était pensionnaire qu'il découvrit les oeuvres d'Edgar POE et qu'il conçut le projet de se rendre en Angleterre afin d'apprendre l'anglais et de pouvoir lire Poe dans le texte. Il se rendra donc à Londres en 1863 où il se mariera avec une jeune fille rencontrée à Sens, avant de revenir en France où il deviendra professeur d'anglais. Au cours de sa carrière, il publiera un "cours d'anglais" même si cela ne restera pas son oeuvre la plus célèbre ! Mallarmé tentera même à plusieurs reprises, mais en vain, de se faire nommer professeur d'anglais au lycée de Sens.


Au XXème siècle :

En juin et juillet 1944, l'aviation anglo-américaine bombarde à plusieurs reprises le pont de chemin de fer qui passe à Sens, ainsi que les usines environnantes. Suivra la brève rencontre des Sénonais avec les troupes américaines de la 3ème armée du Général PATTON lors de la libération de la ville le 21 août 1944. Il en restera surtout, et encore de nos jours, le "Rond-point de l'Armée Patton" vers la gare de Sens, à la sortie vers Paron, direction Nemours ou Montargis.

[cf. "La Libération de Sens (21 août 1944)" - travail d'un groupe d'élèves sous la direction de M. Joël DROGLAND © 1984 - Collège Stéphane Mallarmé de Sens]

On reconnaît l'entrée de la Mairie de Sens à droite du 3ème véhicule armé.

Entre 1980 et 1993, une des professeurs d'anglais du Collège des Champs-Plaisants à Sens, Mme Anne-Lise OZIL, (sur les pas de Mallarmé ?), a mis en place des échanges réguliers d'élèves entre Sens et Waltham Abbey, petite ville située dans la "ceinture verte" londonienne, au nord de la capitale anglaise.

    - Création d'une Association Franco-Britannique -

Il n'est donc pas surprenant de la retrouver aux côtés de M Frédéric BESSET - ancien élève du collège Stéphane Mallarmé et jeune conseiller municipal - lorsqu'il prit l'initiative de la création d'une Association Franco-Britannique à Sens en 1991 dans le but de faire enfin aboutir l'idée d'un jumelage avec une ville anglaise... M Besset qui rentrait justement, ironie de l'histoire, d'une année d'étude passée à ... Canterbury ! Mais Canterbury, liée historiquement à Sens, avait, hélas, déjà fait un autre choix de jumelage suite aux refus antérieurs de se jumeler exprimés par les élus sénonais trop conservateurs dans les années 1960 à 1990, et qui refusèrent obstinément de s'ouvrir sur l'Angleterre malgré les demandes répétées de certains Sénonais, voire même de quelques conseillers municipaux convaincus de l'utilité d'un jumelage avec la Grande-Bretagne pour favoriser (entre autre) l'apprentissage de l'anglais par les jeunes élèves des collèges et des lycées de la ville.

Le Sénonais Libéré du 21 mai 1991

    - Les voyages scolaires -

Notons toutefois au passage le dévouement de ces enseignants de langue qui ont néanmoins organisé (sans soutien entre 1976 et 1993) de nombreux voyages en Grande-Bretagne pour le bien de leurs élèves : leurs noms (Mmes JARRY, OZIL, NIMSGERN, MM URBANIAK, PIGUET, REBOUL, DELOSIER, YANEZ... plus tous ceux dont nous ignorons les efforts) réveilleront certainement les souvenirs excitants de la découverte d'une terre étrangère chez de nombreux Sénonais adolescents à l'époque. Expérience non négligeable quand on sait ce que les voyages font à la jeunesse !

Lors d'un tour de table organisé par l'A.F.B.S. naissante, on s'aperçut que les établissements scolaires de Sens se rendant en pays anglo-saxon avaient des points de chute variés mais changeants = Durham, Bath, Chingford, Greenwich ou Finchley en Angleterre, voire les États-Unis pour certains lycéens. Mais aucune ville ne pouvait s'enorgueillir d'une longévité des liens avec Sens comme celle de Waltham Abbey.

    - Un jumelage, enfin ! -

A cette époque, seule la ville de Waltham Abbey avait alors exprimé sa volonté de se jumeler pour consolider les échanges scolaires déjà anciens entre les 2 villes - ce fut donc, après diverses visites et une longue étude du dossier, la proposition faite par l'A.F.B.S. pour un jumelage. Mais la municipalité de Sens d'alors n'entérina pas ce choix et il fallu attendre 1993, suite à un changement de maire qui débloquera une situation trop longtemps négative, pour que la ville renoue un lien officiel avec l'Angleterre par son jumelage avec la ville de CHESTER, une des plus belles cités du Royaume-Uni, il faut bien le reconnaître.

6 avril 1993

    - Construire une Europe nouvelle - 

C'est cette époque d'échanges fraternels que nous vivons, et depuis 1993, on peut le noter avec satisfaction, les équipes qui se sont succédées à la gestion des affaires locales ont toutes soutenu beaucoup plus activement le développement des échanges - notamment pour la jeunesse - avec les villes jumelles. Nous y voyons le signe d'un changement de mentalité et le passage de l'indispensable "réconciliation" des anciens combattants (jumelage dès 1966 avec Lorrach en Allemagne) à la "construction" d'une Europe ouverte (jumelage avec Senigallia en Italie en 1981, puis avec Chester, ville d'Angleterre, en 1993). Disons, pour ne pas être trop sévères, que Sens n'a pas été précurseur en la matière, c'est le moins que l'on puisse dire ! Mais, mieux vaut tard que jamais...

Citons également parmi ceux qui apportent leur pierre à cet édifice de connaissance mutuelle, les enseignants de la Chambre de Commerce et d'Industrie ainsi que ceux de l'Université Sénonaise pour Tous, tout comme - pendant une période - ceux du GRETA, qui depuis les années 1980 remettent à niveau de nombreux sénonais dans la pratique de la langue anglaise, favorisant ainsi les échanges.

Dans le domaine industriel, il existe des liens avec le monde anglo-saxon, soit par l'entreprise américaine F.M.C. (qui depuis de nombreuses années fabrique à Sens des bras de chargement de pétrole), ou, depuis le jumelage avec Chester, par la Chambre de Commerce et d'Industrie de Sens qui a embauché une jeune britannique, Ms Susan EGGLESTON, qui est plus spécialement chargée de favoriser les contacts avec les entreprises du Royaume-Uni.

Depuis quasiment le début de ce jumelage, la ville de Chester et sa région sont régulièrement représentées sur la Foire de Sens, début mai chaque année, et dans différents salons économiques et industriels. Ces liens ont déjà permis à plusieurs jeunes sénonais d'aller faire des stages d'apprentissage à Chester.

Pour compléter ce tableau des liens existants entre Sens et l'Angleterre, notons qu'en 1986 Mr Simon EVANS, citoyen de sa Gracieuse Majesté, a ouvert à Saint-Denis-les-Sens un chantier naval pour la réparation et la construction de bateaux jusqu'à 20 mètres de long. Et en 1996, un petit brasseur de la région lançait une nouvelle bière, la "Thomas Becket", ravivant ainsi un lien ancien entre notre cité et Albion...

- la bière de Sens -

l'abus d'alcool vous troublerait-il la vue ?
 Cliquez sur la photo pour y voir plus clair ! 

C'est cette Europe en marche que nous souhaitons bien sûr aider à se développer.

    - Des échanges personnels -

Mais les liens entre la ville de Sens et ce monde anglo-saxon qui en est apparemment assez éloigné (en distance tout du moins - 500 km au minimum), ces liens donc ne sont pas le seul fait de personnalités publiques que nous venons d'évoquer et qui ont su laisser une trace bien apparente sur la trame de l'Histoire, qu'elle soit européenne ou plus modestement locale. Non, ces liens sont également le résultat de relations et d'échanges plus obscurs, plus intimes, plus évanescents aussi, puisque connus des seules personnes concernées et qui disparaîtront avec elles. Mais ce sont ces échanges personnels qui sont la garantie de liens vivants et le signe d'une acceptation mutuelle passant inévitablement par une meilleure connaissance de l'autre. C'est cet objectif que visait l'institution des jumelages entre les villes au sortir de la seconde guerre mondiale ; c'est ce but que cherche à atteindre une association comme la nôtre. Notre rôle consiste surtout à "faire connaître" l'Autre et à souhaiter que nos concitoyens l'accepteront alors plus facilement, même si nous ne voyons pas le résultat immédiatement.

Parfois, les choses sont tellement secrètes que l'on a tendance, à tord, de les croire inexistantes. C'est comparable à ce que tout enseignant de langue espère observer un jour : voir ses élèves se lier d'amitié avec des jeunes étrangers et parler cet autre dialecte patiemment appris en cours. Or cet échange se passera peut-être loin de ses yeux, et beaucoup plus tard, mais il n'en existera pas moins pour autant et le rôle de l'éducateur aura été primordial - en tant qu'association franco-britannique, nous souhaitons être des "éducateurs" !

Dans notre ville, ces liens sont concrétisés par les familles sénonaises et celles de Chester (ou d'ailleurs) qui se sont liées d'amitié et qui se rendent régulièrement visite - même s'il est impossible d'en évaluer le nombre exact. Ces liens sont concrétisés par ces quelques anglo-saxons qui ont choisi de venir vivre parmi nous (et nous en connaissons certains). Ces liens deviennent réalité lors de voyages-découvertes ou d'expéditions du genre "une semaine de pêche en Irlande" ou "6 mois comme jeune-fille au-pair en Écosse", même si ces aventures ne font jamais la Une de la presse locale. Ces liens existent lorsque des anonymes participent à la projection d'un film anglais en V.O. lors d'une séance de cinéma à Sens, ou se déplacent à l'invitation de la Commission des jumelages pour une découverte de la visioconférence en direct avec nos villes jumelles. Ces liens deviennent encore réalité lorsque des jeunes Sénonais passionnés d'Internet échangent des "e-mails" (cette nouvelle forme électronique de courrier) avec des teen-agers londoniens ou cestriens qu'ils n'avaient jamais rencontrés auparavant.

    - Symboles et illustrations - 

Toutes ces expériences sont réelles et multiples. Il est vrai que ces échanges ont parfois intérêt à être valorisés par des articles de presse ou des regroupements (réunions, conférences, cérémonies, commémorations... ), voire même symbolisés dans des objets qui cristalliseront une relation ou une reconnaissance culturelle, comme c'est le cas avec ce site Internet par exemple, ou encore cette cabine de téléphone rouge, venue tout droit de Londres, si typiquement britannique, et qui a été installée en 1992 (?) dans la cours du collège des Champs Plaisants de Sens, et qui évoque chaque jour "nos amis d'Outre-Manche". C'est aussi cette peinture classique d'un grand voilier entrant dans l'ancien port de Chester, toile offerte en 1995 (?) à la ville de Sens par le municipalité cestrienne, et qui doit évoquer à ceux qui l'admirent jour après jour les liens qui unissent nos deux cités. (Mais au fait, où est-elle passée cette toile ?).

L'arrivée du Schooner américain MAY dans le port de CHESTER en 1863
Oeuvre de Gordon Frickers (1993)

La réalité concrète de ces liens dans les années 1990 c'est aussi ce Sénonais (dont nous ignorons le nom) collectionneur de voitures qui s'est spécialisé dans l'Austin Mini si emblématique de l'Angleterre des Sixties ; c'est l'apparition de "PUBs" à Sens ; ou encore l'installation de restaurants "fast-food" d'une chaîne on ne peut plus anglo-saxonne, et puis également ce rond-point, créé en l'an 2000, sur l'axe routier sortant de la ville vers le nord et portant le nom de la ville de Chester...

Concrétiser ces liens privés, c'est aussi rapporter ces petits évènements marquants, vécus par quelques uns, et qui deviendront le support d'une découverte de l'autre et de ses particularités. Nous vous proposons donc de consulter notre page "d'histoires typiques" et nous vous invitons à nous confier vos récits personnels d'incidents si British ! Nous les ajouterons à ces colonnes.


Et notons au passage que parmi les meilleurs atouts attribués à la ville de Sens par nos amis anglais, il y a la proximité de Chablis ! Qui a dit que les Britanniques n'avaient pas bon goût ? Rien n'est plus faux !



Thèmes Page d'entrée

 

© BP / PECAS - Octobre 2004
page complétée en juillet 2005